mercredi 27 août 2014

Pif paf peuf.

La veille au soir, j'ai appris avec une stupeur somme toute minime comment le gouvernement français venait de se faire virer, tout en me demandant quelle espèce d'influence cela pourrait bien avoir sur ma vie ici à Santiago...

Manifestement aucune sur mon programme du jour, en tout cas ! Ce matin, en route pour les contrefort des Andes en amont de Santiago, pour dévaler les pistes ! Une fois la location de matos effectuée, je monte dans le van qui nous conduira loin, et surtout haut, très haut...

Le chemin menant aux stations de ski de Santiago est absolument spectaculaire : il s'agit en fait d'une route, une seule, isolée, sans aucun chemin parallèle ou embranchement, qui parcourt les 60 kilomètres nous séparant de Valle Nevado. Il faut la voir serpenter entre toutes ces combes tout en grimpant inlassablement. Le paysage, quant à lui, est absolument grandiose.



Avec un magnifique glyphe spectral flottant dans le ciel, probablement une aberration géométrique due à des conditions de Gauss pas totalement respectées... Rghhgn gggh taupin sors de ce corps...




Après pas moins de 2h30 de route, Valle Nevado se dévoile. Eh oui ! Val Thörens aura beau jeu de dire que c'est la plus haute station de France et d'Europe avec son village à 2300 mètres d'altitude, ici je vous parle d'une station dont la base se situe à 3000 mètres et qui culmine à plus de 3600 mètres.


Valle Nevado, "la Vallée Enneigée" en français, est une des 16 stations de ski du Chili, et l'une des 5 correctes, les autres étant du niveau Col de Marcieu. On y trouve donc - attention les yeux - pas moins de 3 télésièges débrayables, pour un domaine skiable à peu près deux fois moindre que celui des Sept Laux.

Le temps de tout décharger du van et de récupérer mon forfait, je ne suis pas sur les pistes avant 11h. Le Guide du Routard n'avait donc pas menti... Cela est regrettable au vu du prix indécent de la journée, mais je suppose que cela doit être le rythme à la chilienne. Le ski au Chili en général est une activité très cuica, c'est-à-dire de riche, bien plus encore qu'en France. Il n'y a qu'à voir la mentalité des publicités sur le télésiège...

"Nous t'apprendrons toutes les tendances et les styles du ski ou du snowboard. Tu seras celui qui en sait le plus sur ce sport parmi tous tes amis."
À part ça, la neige est effectivement somptueuse. Il y a de la poudre à ne plus savoir qu'en faire. Les pistes sont larges et il n'y a personne. Pour ma première sortie ski depuis un an et demi, je pouvais difficilement espérer mieux. Malgré les skis absolument bidons que m'a refilé le gars du service de loc', je profite comme un fou.

El gringo dans toute sa splendeur.
D'aucuns sont déjà passés ici avant...
Vue du point culminant de la station, je ne sais pas quel sommet c'est mais autant vous dire que c'est à plus de 5000 mètres. Vérification. Il s'agit d'El Plomo, 5400 mètres.

Les noms des pistes sont assez différents de ce qu'on trouve en France, d'ordinaire assez centré sur les noms d'animaux. Ici, point d'Éterlou, de Marmotte ou de Dahu, en revanche on trouve du Tango, la Valle del Inca (Vallée de l'Inca), El Beso (Le Baiser), la Momie, l'Éclipse ou encore ma préférée, Ciao smog qui montre bien ce que les Santiaguinos recherchent en venant au ski.

Chose assez amusante, si prendre un télésiège est quelque chose de tout à fait banal, une fois dessus, quand on repense qu'un séisme peut survenir à tout moment, cela ajoute un peu d'adrénaline !


Les photos peinent à rendre justice à l'immensité des paysages andins.
Bref, la journée se conclut en redescendant cette interminable autant qu'improbable route. Quelle idée de venir nicher la station aussi loin, et quel boulot cela a dû et doit être de construire et d'entretenir cette route de 2500 m de dénivelé dans un pays qui se prend des séismes à tout bout de champ... Même si c'est une bonne idée. La station (ainsi que les trois autres stations de Santiago, qui la jouxtent et empruntent la même route) est située sur une sorte de plateau gigantesque parsemé de vallons, le tout à plus de 3000 mètres d'altitude. Et au moins, comme les stations sont de taille modeste et sont toutes regroupées, les sommets voisins gardent leurs versants intacts de toute colonisation humaine, si ce n'est cette trace de skieurs de randonnée, qui ont sans doute quelques bons tuyaux à nous apprendre à nous autres skieurs alpins... enfin andins !


La fin de journée embellit encore le tout.


Le virage type de la folle route qui mène aux stations. On dira que le flou représente la vitesse à laquelle le conducteur du van les prenait.

lundi 25 août 2014

Levée de brouillard.

Dimanche, les nuages sont toujours là. Il pleut sporadiquement et la température ne grimpe pas ; je commence à m'interroger sur la pertinence de mon choix de vêtements pour mon séjour, car ma valise est constituée en grande partie de T-shirts et de bermudas.

Je repense au tremblement de terre de la veille et apprends que Laetitia, actuellement aux États-Unis chez les Johnson, s'est prise elle aussi un séisme ! De même magnitude mais à 15 km de l'épicentre (celui du Chili était à plus de 100 km de Santiago), sauf qu'apparemment c'était en pleine nuit et que cela ne l'a même pas réveillée... Quelle coïncidence tout de même !

Mula m'emmène faire un tour dans le quartier, notamment jusqu'au mall, le grand centre commercial de Santiago, situé à 10 minutes à pied de chez nous. Rien à signaler à part qu'il se rapproche fortement des centres commerciaux "occidentaux", et qu'on y retrouve la plupart des grandes marques (H&M, Converse, McDonald's...). Au dernier étage, les fast-food s'alignent comme autant d'étals de marché.

Ce qui  méritera une photo quand je penserai à prendre mon appareil.

Sur le chemin du retour, nous faisons des courses : sous les yeux écarquillés de Mula, je mets dans le caddie des articles aussi sophistiqués que... des pâtes, du riz, du ketchup, des œufs. Ce n'est clairement pas lui qui va me tirer vers le haut pour la cuisine et je sais que je ne devrai compter que sur moi-même. Le défi sera permanent quand on sait que juste en bas de l'appartement m'attendent en permanence des empanadas toutes chaudes pour 1000 pesos (1€30)...

Le temps est encore trop mauvais pour rester plus longtemps en ville et je passerai le reste de l'après-midi dans la relative chaleur de mon appartement. Un petit apéro en soirée me fera retrouver Charles et Carla, en compagnie de Mateo et d'Hanane, jeunes Français et Marocaine travaillant tous deux à la Chambre, de futurs collègues. L'appartement de Mateo est au huitième étage et le séisme a dû être autrement plus impressionnant de chez lui.

Lundi 25 août au matin. Je traîne un peu dans mon lit à la faveur de ces quelques jours où je peux encore me le permettre. Cependant, en soulevant le rideau, je m'aperçois que c'est un ciel entièrement bleu et dégagé qui m'attend. Pas une seconde à perdre !

Le río Mapocho, petite rivière qui traverse Santiago d'est en ouest au pied du Parque Metropolitano.
Enfin les Andes dévoilent leurs majestueux sommets tout autour de la ville. Je me dirige vers le Parque Metropolitano, un parc situé sur une petite colline appelée San Cristobal, du nom du saint patron des voyageurs car la colline était le point de repère des conquistadors qui fondèrent et firent prospérer Santiago. Le soleil ne faiblit pas, l'air chauffe et l'appareil photo aussi.





Trouverez-vous l'erreur sur cette image ?

Au Chili, les canards ont un espèce de chapeau blanc sur la tête.
Ville, mer et montagne sur un même cliché. À l'aise.
Le Parque Metropolitano ne frappe pas par sa beauté naturelle : il s'agit moins d'un parc entretenu que d'une zone de pleine nature au milieu de la ville. Les chemins sont en fait des routes, partagées entre piétons, cyclistes et voitures... Dès que l'on cherche à s'éloigner des sentiers, ou plutôt donc des routes battues, on se retrouve sur des chemins en terre super mal indiqués et vraiment à peine plus jolis, qui en plus aujourd'hui sont rendus difficilement praticables par les récentes averses. Cependant la vue du sommet est assez splendide, sublimée par les deux derniers jours de pluie qui ont quelque peu rincé le smog ambiant. Quatre heures de marche tout de même pour faire l'aller-retour à pied de chez moi jusqu'aux hauteurs du parc dans la boue ; mes chaussures de randonnées n'auront pas été de trop.

Des quartiers nord à faire pâlir Marseille de jalousie.
Ce ne sont pas des bidonvilles, mais presque.
La vierge de saint Christophe trône au sommet de la colline du même nom.
Il est assez difficile d'évaluer la taille d'une ville comme Santiago. De tous côtés, elle s'étend à perte de vue, jusqu'à être absorbée par le nuage de pollution pourtant plus faible que d'ordinaire... À part le pied des montagnes, nulle part je ne vois de "fin", d'horizon. Il commence à être envisageable que l'on soit dans une agglomération de six millions d'habitants...

Chassez le smog naturel, il revient au galop.
L'après-midi, rendez-vous à la Chambre pour y rencontrer Augustin, mon futur manager. Il me présente à l'équipe, me fait le tour des locaux et me décrit un peu le fonctionnement du travail ici. Il me rassure à propos des problèmes de visa. Enfin, je lui demande quelques conseils pour demain. En effet, la dame du Sernatur, l'office national du tourisme chilien que je suis allé consulter ce matin, me l'a assuré : toutes les pluies tombées ce weekend étaient de la neige en station...

samedi 23 août 2014

Premiers pas mouillés.

J'ai emménagé dans l'appartement. Celui-ci est en très bon état, très lumineux grâce aux fenêtres qui couvrent toute la largeur des pièces. Je rencontre Cristian, Mula de son surnom, mon colocataire chilien de 34 ans, designer industriel pour des usines de meubles de ce que j'ai compris. Mula parle un espagnol plutôt compréhensible mais pas évident non plus pour autant. Il a pris une pause dans sa journée de travail pour venir m'ouvrir et repart donc vite, mais non sans m'avoir fait faire un petit tour de quartier pour voir les premières nécessités : boulangerie en face de l'appartement, pharmacie, bar, et également un commerce de proximité qui vend de tout, depuis les journaux et autres barres de chocolat jusqu'à la nourriture pour chat.

Car oui, nous avons un chat. ¡ Hola Ernesto !
Je profite du reste de la journée pour déballer un peu mes affaires et prendre mes marques. L'après-midi, une petite ballade s'impose jusqu'au río Mapocho. Le soir, je rencontre Charles, un Français actuellement en stage à la Chambre Franco-Chilienne, celui dont je vais prendre la relève dans une semaine. Il m'emmène dans un bar du coin pour découvrir le pisco sour (prononcer "piscosaweur"), le cocktail national, fait à base d'un alcool de raisin, le pisco, mélangé à du jus de citron, du sucre et du blanc d’œuf. Chiliens et Péruviens s'en disputent la paternité farouchement, et effectivement voici qu'arrive Carla, colocataire péruvienne de Charles. Ce n'est pas le moment de rentrer dans le débat... Toujours est-il que c'est très bon et que ce brave pisco va sans doute vite devenir un incontournable de mes soirées chiliennes !

Cap ensuite sur Bellavista. Bellavista, c'est le quartier des bars et de la vie nocturne. Situé à deux kilomètres de là, pour y aller nous prenons le...taxi ! Les taxis sont le moyen de transport le plus commode à Santiago et sont surtout suffisamment peu chers pour pouvoir se les offrir : effectivement, l'aller-retour de Providencia à Bellavista (ces noms ne laissent-ils pas rêveurs ?) nous aura coûté cinq euros, à se partager entre les trois passagers que nous étions.

Voitures noires, toits jaunes, plaques orange : les taxis pullulent à Santiago, et probablement encore plus à Providencia.
Soirée chilienne très sympathique où finalement les plus grands absents auront été... les Chiliens, car entre les deux Français et la Péruvienne que nous étions, et le Colombien qui nous a servi, on aurait pu se demander dans quel pays on était. Découverte ce soir du cocktail terremoto ("tremblement de terre"), de l'alcool assez fort servi avec un glace qui inhibe son goût et le rend donc particulièrement traître.

Le lendemain, réveil tranquille avec la tête qui tourne un peu. Devant ma tête en pétards, je décide de la nécessité de prendre une douche. Mula m'a certifié et démontré hier que celle-ci marchait, et c'est donc en pleine confiance que je m'avance dans cette salle de bains dont la fenêtre ne se ferme pas (super quand la température extérieure est plus basse que 10°C !). Mais après mon premier savonnage, impossible de ré-obtenir de l'eau chaude : celle-ci s'obstine à rester froide GELÉE du genre ruisseau descendant tout droit de son glacier. Il est neuf heures du matin, je suis couvert de savon, l'eau est à une température décemment inimaginable, la chaudière ne marche pas et Mula dort à poings fermés : je suis perplexe. Finalement après moult tergiversations je réussis à faire fonctionner la chaudière, et alternant tant bien que mal entre eau à 50 °C et eau à 5 °C, je me lavai proprement, au point d'en faire un pléonasme.

Petit bilan. Je viens de boucler 24 heures sur le sol chilien. J'ai mangé au Chili, j'ai bu au Chili, j'ai dormi au Chili, je me suis lavé au Chili, et j'ai survécu au Chili. Je descends me prendre une petite empanada pour fêter ça.

Hier, il faisait moche ; aujourd'hui, il pleut. Avec tous ces nuages je n'ai toujours pas vu la fameuse Cordillère des Andes depuis Santiago ; à peine l'ai-je entraperçue dans le taxi entre l'aéroport et la ville.

Santiago sous la pluie. Je suis assez fan des deux palmiers juste en face de ma chambre.
Je rejoins Charles qui m'explique qu'à Santiago les pluies sont tellement rares qu'il n'y a quasiment pas de système d'évacuation d'eau. Effectivement, une demi-heure après le début des pluies, les canalisations débordent déjà et répandent de merveilleuses odeurs de par les rues. Nous trouvons refuge à la Fuente Alemana, un restaurant gastronomique "typiquement chilien" en débit de son nom, indiqué par Charles.

Voilà ce que devrait être un Big Mac si Mac Donald's respectait les proportions de ses publicités dans ses restaurants.
Donc oui, c'est un énorme burger, avec plein de bouts de bœuf, de la sauce à l'avocat et de la mayo. L'avocat étant déjà à la base le légume le plus gras ou pas loin. En fait, aux dires de Charles, la moitié des Chiliens sont gros et c'est simplement parce qu'ils mangent n'importe quoi, comme ce brillant dégoulinant exemple. Le restaurant n'est constitué que d'une unique pièce partagée entre la cuisine et les clients : il est donc possible de s'asseoir face aux cuistots et de les voir mettre une énorme louche de mayonnaise sur leurs pains avant de réaliser que le sandwich en préparation est le même que le sien.

J'aurais bien visité le centre de Santiago cette après-midi mais le temps ne s'y prête guère ; Charles devant travailler son mémoire de fin d'études, je rentre à l'appartement où Mula n'est toujours pas levé à 15h et passe l'après-midi sur l'ordinateur en en profitant pour donner quelques nouvelles aux amigos restés en France.

Un rayon de soleil dans une journée bien pluvieuse.
En début de soirée, des vibrations secouent un peu le lit. Je commence à m'étonner que le voisin du dessus fasse à ce point trembler les murs en faisant son sport quand...


Là c'est trop fort pour être un simple coco qui fait ses exercices à fond. C'est un tremblement de terre qui est en train de passer ! Ouah. Ça dure 6 ou 7 secondes et ça secoue pas mal. Je partage ma stupeur avec mes interlocuteurs Facebook du moment. En ville, aucun dégât, quelques voitures ont klaxonné mais c'est tout. Normal. Après investigation, il s’avérera que le séisme était d'une magnitude de 6,4 sur l'échelle de Richter, ressenti autour de 5 à Santiago. Finalement, le terremoto d'hier soir était précurseur... Mon coloc sort de sa chambre pour la première fois de la journée et me dit : "Deuxième jour au Chili, et premier tremblement de terre ! T'es un veinard, toi." Bienvenue au Chili.

vendredi 22 août 2014

Vol de nuit.

Les procédures d’enregistrement son bien plus rapides que la dernière fois où j’avais pris l’avion (2011, tout de même). On peut imprimer soi-même ses étiquettes de bagages et sa carte d’embarquement et gagner pas mal de temps. Et surtout, on faisant comme ça on peut aussi choisir sa place parmi celles qui sont encore disponibles : j’ai donc pu changer ma place à un siège du hublot par une tout contre ledit hublot. Pour autant, les deux heures de marge que j’avais étaient loin d’être de trop, le temps de marcher jusqu’au terminal puis à la porte d’embarquement et de poster le précédent article.

L’avion est plein aux trois quarts. Je n’ai pas de voisin, donc pas de  bataille d’accoudoir en vue, c’est déjà ça de pris. Le décollage depuis Roissy est assez féerique. De nuit, le champ de décollage n’est qu’un ballet de couleurs, des petits lumignons rouges, jaunes, verts et bleus jonchent le sol à perte de vue, accompagnés régulièrement par les gros phares blancs d’un avion.

Puis c’est le décollage, les lumières rapetissent. Cap sur Nantes, puis Santiago… de Compostela (Saint-Jacques-de-Compostelle), puis… Ah, vous savez.

Tout le service est d’un peu meilleure qualité, en fait. Autrefois, on distribuait dans les avions une paire d’écouteurs tous pourris. Maintenant, c’est un casque tout pourri. Autrefois, on distribuait un coussin. Maintenant, c’est un coussin et une couverture. De même le logiciel de l’écran des sièges est bien mieux : on peut maintenant non seulement suivre le plan de vol, mais également voir à la carte de nombreux films (de la Petite sirène au Hobbit 2 en passant par Divergente ou Nebraska ou Minuscule), mais également écouter de nombreuses musques (d’Aloe Blacc à Florent Pagny en passant par Ibrahim Ferrer ou Andrea Bocelli), regarder des séries et magazines télé (d’un documentaire de sophrologie aux moments forts du dernier match de Premier League en passant par Kaamelott et le Palmashow) et jouer (il y a une télécommande détachable qui peut faire office de manette de jeux).

On nous distribue les plateaux repas du soir et on nous prévient que celui du petit-déjeuner sera anticipé de quelques heures en raison du survol de la Cordillère des Andes qui risque de générer quelques turbulences et pendant le survol duquel il sera interdit de se lever. Hmmm…

C’est parti pour la plus longue nuit de ma vie. Oh, non pas que je sois mal installé. C’est juste qu’en partant à 23h20 et en arrivant à 7h10 heure locale après 13h50 de vol en fuyant le soleil, il ne faut pas être un animal à sang froid.

Les lumières de l’Europe ont disparu il y a bien longtemps déjà et à mon réveil je distingue des points lumineux en bas de l’avion. Cette fois, boum, ça y est ! On est en Amérique du Sud, pour de bon. Les gens qu’il y a à côté de ces lumières, ce sont des Guaranis, des Quechuas, des Mapuches ! Et des Sud-Américains normaux, aussi. Au Brésil, à la différence de la France, les lumières au sol ne sont pas regroupées en villages mais sont toutes isolées les unes des autres, si bien qu’on a du mal à distinguer un point lumineux émanant du sol d’une étoile.

En parlant d’étoiles, il va falloir que j’apprenne mes constellations de l’hémisphère sud. J’ai dit adieu à la petite Ourse, et ici le W de Cassiopée est un M.

Et puis d’un coup, paf, une ville. Une ville bien grosse. D’après le carnet de vol, il s’agit de Mato Grosso, au Brésil. Ses rues forment un gros quadrillage, à part qu’il s’agit en fait de plusieurs quadrillages imbriqués. Voyez plutôt ce que ça m’évoque.

De jour, les quadrillages sont un peu moins évidents.

Une lame mince de gabbro.
Une heure plus tard, nous survolons le Paraguay. Là, plus aucune lumière. C’est un pays qu’il doit pas être très beaucoup peuplé, le Paraguay.

Nous approchons désormais des Andes. Le soleil qui nous rattrape inexorablement va se lever sur la région de la Rioja, en Argentine. Je guette comme un fou l’apparition des premiers sommets.

Ça y est, nous avons reçu la consigne de rester assis pendant les remous du survol de la Cordillère. Le livre/film Les survivants, vous connaissez ? Hin hin.

Ah, mais me direz-vous, si j’ai pu poster cet article, c’est bien que j’ai survécu, hein ? Bande de gros malins. Moi et mon suspense à deux balles.

Toujours est-il que les remous, si on ne m’avait pas dit qu’il y en aurait, je ne les aurais même pas remarqués. Tout un foin pour ça. Par contre, les paysages du lever de soleil sur la Cordillère des Andes fait partie de quelques moments magiques qui resteront longtemps. Quel dommage que j’aie oublié la carte mémoire de l’appareil dans mon PC et que je n’aie donc pu prendre que 10 photos, hein. Et encore, de l’autre côté de l’avion, ils avaient le soleil, eux.

Du chouettes fonds d'écran en perspective.

La Cordillère des Andes vue du ciel. Au loin, l'océan Pacifique. Entre les deux, a priori, le Chili.
Ahem, rectification. Au loin, le brouillard. En-dessous, a priori, le Chili.


Des nappes de nuages recouvrent toute, absolument toute la plaine et dégoulinent des montagnes.
Des quelques trous ci et là parmi les nuages, je tire déjà une première conclusion : les Chiliens sont apparemment des braves gens qui conduisent à droite. On va bientôt amorcer la descente. Le chef de bord nous informe qu’il va nous passer une vidéo sur les contrôles douaniers du Chili et qu’il faut qu’on regarde bien parce qu’on pourra nous poser des questions dessus lors du contrôle de douane. Ambiance école primaire bonjour !

Les contrôles de douane prirent environ deux fois plus de temps qu’à l’aller, quelle plaie ! En plus on ne m’a même pas posé de question sur le film, je l’ai regardé pour rien, zut. MAIS au moins, j’ai obtenu mon tampon de visa !

Ah, il est beau, hein.
Le premier de nombreux à venir j’espère ! Mon nouveau passeport est dépucelé et il se sent bien mieux. Je change mes euros restants en pesos chiliens et réserve un taxi. Une fois sorti de l’aéroport, premier choc : il fait 5°C au thermomètre ! ¡ Qué frío ! On dirait que mes deux vestes vont me servir, finalement !

Prochain défi : rentrer dans mon appartement. J’avais depuis la France déjà dégoté un super logement et bien placé, en colocation avec un Chilien, Cristian, qui en est aussi plus ou moins le propriétaire. Mais, je suis dans le taxi en direction de mon adresse et ce coloc n’a toujours pas donné signe de vie depuis une semaine que j’essaie de le contacter ! Il va être temps de savoir si et comment je vais pouvoir récupérer mes clés...

Pendant le trajet depuis l’aéroport jusqu’au centre-ville, le brouillard ne se lève pas. Le suspense reste entier… Bon, la radio et les panneaux sont en espagnol, donc a priori on est sur la bonne voie quand même.
Le taxi me dépose. Enfin Cristian répond ! Il est occupé à l’instant mais pourra passer m’ouvrir dans une heure. J’en profite donc pour faire une petite reconnaissance, notamment jusqu’à mon lieu de travail qui est à 4 minutes de marche de mon logement… avec mes plus de 30 kg de valises.




Providencia est le quartier d’affaires de Santiago, il y a donc dans le coin quelques tours vitrées. Une fois mon tour de pâté de maison terminé, je me pose sur ma valise pour coucher cet article en attendant Cristian.

Et là, c'est mon chez moi. Plus précisément, l'appart au deuxième étage, deux fenêtres à droite de celle où il y a des fleurs. (donc, celle où il y a... une chaussure sur le rebord, oui oui)

jeudi 21 août 2014

H-1

Avant de partir et malgré toutes mes protestations, ma grand-mère a réussi à me faire avaler un énorme bifteck à 19h alors que je n'avais pas du tout faim. Je crois qu'elle veut me faire grossir avant mon arrivée au Chili pour diminuer mes chances de séduire une chilienne et de vouloir m'installer là-bas. Tous les coups sont permis, décidément.

Mais ça y est, malgré un RER en travaux de Saint-Germain au Pecq, une bonne demi-heure de correspondance à Châtelet et un ultime changement de rame une station de RER avant la fin, me voilà à l'aéroport. Je suis arrivé au gigantesque et majestueux terminal 2E de Roissy Charles-de-Gaulle.


Le soir, l'aéroport se transforme en un énorme repaire hispanophone. Ce qui s'explique facilement quand on jette un œil aux destinations : Buenos Aires, Montevideo, Mexico, Santiago... Mais il y a également de nombreux vols en direction de l'Asie et donc beaucoup de chinois. Autant ce matin j'avais du mal à réaliser que le lendemain je me réveillerais au Chili, autant maintenant cela me paraît nettement plus envisageable.

Je vous l'avais promise : la voilà. Un style inimitable au moment de la dépose des bagages : une veste en cuir, ma parka de ski et mes chaussures de rando. Un style précurseur totalement hype que je n'ai conservé que 5 minutes pour ne pas me le faire piquer par de fourbes plagiaires.

Enjoy.
J'ai demandé à une vieille dame de passage de prendre cette photo. Rien de bien compliqué, juste un bouton à appuyer. Certes, il faut aussi prendre la peine d'orienter l'objectif vers le sujet de l'image. Manifestement, c'en était trop pour cette personne, et après 10 minutes de tentatives d'explication en espagnol, j'ai capitulé et abordé un quadra qui a torché l'affaire avec brio en 12 secondes.

Hasta luego.
Jour J.

Nous y voilà. Il est 18h02 ce jeudi 21 août (bon anniversaire à tous mes lecteurs nés un 21 août) (tant pis pour ceux du 20 août) et les choses commencent à se préciser dangereusement. Je me prépare à partir pour ce qui sera mon séjour le plus long et le plus lointain de la France, j'ai nommé : un stage au Chili.

Le Chili, cette étroite bande de terre nichée derrière la cordillère des Andes au fond de l'Amérique du Sud (Santiago est la capitale américaine la plus éloignée de Paris). Le Chili, un pays qu'il est pratique pour en faire des cartes avec sa géographie la plus improbable du monde. Le Chili, on y a inventé la pomme de terre, on y a implanté le plus grand télescope du monde dans l'endroit le plus aride du monde, et, plus rigolo, on y parle espagnol.

Et, effectivement, tout ne s'annonce pas facile. Hier, premier contact avec le pays : visite au consulat chilien à Paris, en face de la bien nommée place Salvador Allende, pour y déposer mon dossier de demande de visa de stage.

Pas de vent, pas de bol.
Celui-ci a bien été accepté mais les délais d'obtention (trois semaines) sont tels qu'il ne me permettront pas de le récupérer avant le début de mon stage le 1er septembre. Et la procédure que je pensais utiliser pour ruser et pouvoir commencer à travailler en attendant la délivrance du précieux sésame n'est apparemment pas disponible pour les demandes émises depuis l'étranger : le conseiller m'indique qu'il faudra venir récupérer mon visa au consulat chilien. "Mais, lui indiquai-je, mon coco, dès après-demain je suis au Chili moi, je pourrai bien aller le récupérer auprès d'un service chilien sur place à Santiago ? - Ah non non mon bon monsieur, il n'y a pas de consulat chilien au Chili, pardi. Il faudra que vous sortiez du pays pour aller chercher le visa dans un consulat chilien d'un pays voisin." Ah... ok. C'est pratique ça dis donc. Petite panique quand même, mais je m'occuperai de ce problème plus tard ; pour l'instant, on me confirme que je n'ai pas besoin de papier pour entrer en tant que touriste au Chili, car... je suis français.


J'ai bouclé mon bagage en respectant bien toutes les conditions d'Air France et en essayant avec moult difficulté de me ménager une marge de poids pour pouvoir ramener plus de trucs au retour. En tout cas, impossible de caser dedans ni ma veste en cuir ni ma veste de ski, toutes deux bien trop volumineuses et pesantes. Donc je les mettrai sur moi pour rentrer dans l'avion. Oui oui, toutes les deux. La photo qui suivra vous laissera rêveurs...

Le vol est direct Paris-Santiago, 11 600 km à bord d'un Boeing 777, 17ème plus long vol commercial du monde.

Un petit vol régional, en somme.
Donc, je vous laisse, j'ai un avion à prendre. J'espère avoir de nouveau l'occasion de vous écrire.